Les cris du jour ou l'écrit du jour ? C'est peut-être le texte de la semaine (et pourquoi pas de l'année ?!!!!)
directement sorti de mon inspiration poétique, où chacun est libre de traverser la frontière entre fiction et réalité...
Bonnes lectures !

mercredi 24 mai 2017

Haïkus humains


Dans le vent doux
les peupliers me bercent
ils m'attendent


Le saule balaye le ciel
de ses feuilles argentées
un enfant dribble entre ses racines


Le chant du pinson
dégouline du peuplier mélancolique
le merle le réconforte de l'acacia


Chant des feuilles
des oiseaux et des enfants
seul en moi le silence


Les éphémères dansent dans l'air doux
portées par les ondes d'un portable
elles apportent d'inquiétantes nouvelles



Deux photographes passent
l'une a relevé ses longs cheveux
pourraient-elles saisir cette balle de ping-pong


Les herbes vivent elles aussi
les cailloux s'en fichent
j'envie leur détachement


Un sourire ami
bavard silencieux
comme les trèfles


Parfum de jasmin
ballet de papillons blancs
le guépier chante en couleurs


Vent doux sur le cimetière
silence paisible
des collines chante la vie


Jardins clos
des thuyas tentent de s’évader
des grilles serrées


à la descente
la montée ne m'avait pas parue
si essoufflée



Atelier d’écriture, Crest, 24 mai 2017
et Saint-Georges-les-Bains, jeudi 8 juin 2017
où j'avais proposé de composer des haïkus en balade.

mardi 16 mai 2017

Tristesse

Je suis un bubon gonflé de pus
Prêt à éclater
Trop tendu pour percer
Je contiens les cris des arbres abattus
Les remords de mes vies passées
Les douleurs de nos mères
La suffocation des océans
Les larmes de mes pères desséchées
Les peines perdues de mes cœurs brisés
Le dégout sans fond des injustices de ce monde
La perte de tous ces êtres chers que je n’ai pas connus
Morts noyés affamés assassinés abandonnés
Ma peau ne les retient plus
Elle voudrait craquer mais rien ne suinte
L’œil hagard
Le ventre boursouflé
Mis en bière pour oublier
Les yeux veinés de sang
Je me traine
Porté par ma foi en la vie
Mais à quoi bon
Si c’est sans joie
Dieu aie pitié de moi
Mes entrailles bouillonnent
Des rats rongent mes orteils de l’intérieur
La vermine m’envahit de la cave au grenier
Et personne ne vient à mon secours dans cette nuit trop longue
J’aimerais céder
Exploser les digues
Ne plus retenir ce flot
Éclabousser le monde de toute cette merde étouffante
Vomir enfin cette boule qui m’étrangle
Trouver un ennemi à ma taille
Lui faire payer au centuple
Qu’il crève la gueule ouverte
Que rien ne lui soit épargné pour toutes ces horreurs
Alors je le regarderais
Gémir de tous ces maux
Avant de le voir sombrer
Dans un abîme sans fin
Et je m’endormirais peut-être
Apaisé et heureux

jeudi 11 mai 2017

Préférez-vous le rêve ou la réalité ? #2

L'arrêt, alité,
se morfondait
sur son lit de convalescence
"Quelle peine de ne plus pouvoir rien stopper
quand on a l'habitude de ne rien laisser filer
c'est un comble de regarder le temps passer"
Et ce dernier passait en effet
lentement
inlassablement
grain après grain
la lumière changeait doucement
les ombres grandissaient mollement
et l'arrêt alité finit par se laisser gagner
par la torpeur contre laquelle il résistait
il s'endormit tout à fait
et se retrouva au beau milieu d'un rêve qu'il avait déjà fait
lui qui s'acharnait habituellement à tout stopper
il se retrouvait alité
et il avait la sensation de vivre un cauchemar éveillé

Soudain un coup de tonnerre le réveilla en sursaut
la fenêtre de son bureau venait de claquer

Tout allait bien
les écrans étaient allumés
la plupart des actions étaient stoppées
tout était sous contrôle
il s'était endormi
sans doute surmené
il ne lui restait qu'un dossier à boucler avant de partir en vacances
cela faisait longtemps qu'il n'en avait pas pris
il en rêvait


Atelier d’écriture, Saint-Georges-les-Bains, jeudi 11 mai 2017
où j'avais proposé d’écrire à partir de la question "Préférez-vous le rêve ou la réalité ?".

dimanche 7 mai 2017

Les nuages

Les nuages font dans le ciel comme des yeux de beurre dans le café
je plonge mon regard dans le tien
les nuances vertes et jaunes de tes yeux bruns reflètent ce ciel de petit déjeuner
j'aimerais être ta tartine que tu me mordilles
puis tu lécherais tes doigts saupoudrés de farine

je laisse passer les nuages
auréoles grasses
à la surface du ciel
tes yeux clignent doucement à mon oreille
tu me chuchotes des marmelades d'amour
je ne dis mot mais je consens

encore une tasse et nous irons marcher
saluer les arbres nos voisins
ils sont si bons
leur grand âge ne semble pas leur peser
et leur peau est si belle
et ta bouche lorsque tu dis leur nom
micocoulier
pin parasol
cyprès
si douces tes lèvres lorsque tu les énumères

ils savent que tu les aimes
ça leur fait du bien
je le vois à leur feuillage plus luisant lorsque tu les caresses
je ne suis pas jaloux au contraire
je suis tellement heureux de recevoir davantage encore d'amour qu'eux
ils ne me jalousent pas non plus d'ailleurs
car ils vivent d'autres amours
plus souterraines dans les entrelacs de leurs racines
ils s'aiment en secret
là sous terre
ils ne se soucient guère des nuages qui tachent le ciel